TikTok a une fois de plus échappé à une interdiction nationale aux États-Unis, du moins pour l'instant. Le président Donald Trump a annoncé la signature d'un nouveau décret prolongeant le délai accordé à ByteDance, la maison mère chinoise de TikTok, pour vendre la plateforme à un acquéreur agréé aux États-Unis. Cette décision donne à TikTok 90 jours supplémentaires pour se conformer à une loi qui, autrement, imposerait son retrait des plateformes d'applications américaines.
Un sursis temporaire après une interdiction permanente
La loi exigeant la vente de TikTok à une entité non chinoise a été adoptée en 2024 sous la présidence de Joe Biden, puis confirmée par la Cour suprême des États-Unis en janvier 2025. Selon cette loi, ByteDance doit céder les activités américaines de TikTok sous peine d'interdiction totale pour des raisons de sécurité nationale. Les législateurs américains ont fait valoir que la plateforme, qui compte environ 170 millions d'utilisateurs américains, pourrait être exploitée par la Chine à des fins de surveillance et d'ingérence politique.
Malgré le soutien bipartisan à l'interdiction, le président Trump a une fois de plus retardé sa mise en œuvre. La porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, a confirmé que Trump publierait le décret cette semaine, donnant à ByteDance jusqu'au début de l'automne pour finaliser la vente.
« Comme il l'a répété à maintes reprises, le président Trump ne souhaite pas que TikTok disparaisse », a déclaré Leavitt. « Cette prolongation durera 90 jours, et l'administration s'efforcera de conclure cet accord afin que les Américains puissent continuer à utiliser TikTok avec l'assurance que leurs données sont protégées. »
Le revirement de Trump sur TikTok
Ce n'est pas la première fois que Donald Trump prend des mesures contre TikTok. Lors de son premier mandat, en 2020, il avait tenté d'interdire la plateforme par décret, invoquant des menaces à la sécurité nationale. Cette tentative avait été bloquée par les tribunaux. Aujourd'hui, dans son second mandat, la position de Trump a évolué.
Bien qu'il continue d'insister sur les préoccupations liées à la confidentialité des données, Trump a affiché une affinité personnelle pour la plateforme. Dans une récente interview, il a même reconnu que TikTok l'avait aidé à conquérir les jeunes électeurs lors des élections de 2024, déclarant : « J'ai une place de choix dans mon cœur pour TikTok, car j'ai gagné 34 points auprès des jeunes. » (Une affirmation contredite par les sondages de sortie des urnes, qui montrent que la plupart des jeunes électeurs ont soutenu la candidate démocrate Kamala Harris.)
Désaccord avec le Congrès et tactiques dilatoires
La décision de Trump d'accorder plusieurs prolongations de délai le place en porte-à-faux avec le Congrès, qui a adopté la loi imposant la vente ou l'interdiction de l'application. Son prédécesseur, Joe Biden, a promulgué le projet de loi, soulignant la nécessité d'agir contre les plateformes technologiques étrangères opérant aux États-Unis.
Cette dernière prolongation de 90 jours marque le troisième report de ce type depuis l'arrivée au pouvoir de Trump cette année. Ses actions ont conduit certains analystes à se demander si une interdiction sera un jour effective.
« En pratique, quelle interdiction ? Il n'y a plus rien d'imminent concernant l'interdiction potentielle de TikTok », a déclaré Kelsey Chickering, analyste principale chez Forrester. « Le comportement de TikTok témoigne également de sa confiance en l'avenir. »
En effet, la plateforme a récemment introduit de nouvelles fonctionnalités vidéo IA lors du festival Cannes Lions, signalant ainsi une activité normale plutôt qu'une entreprise menacée existentiellement.
Les acheteurs américains toujours en lice
Si ce nouveau délai offre plus de temps à ByteDance, l'acquéreur américain de TikTok n'a pas encore été confirmé. Les négociations pour une acquisition américaine durent depuis des mois. En avril, l'administration Trump a affirmé que les États-Unis et la Chine étaient sur le point de conclure un accord qui placerait la majorité des activités américaines de TikTok sous contrôle américain. Cependant, ByteDance a déclaré que des « questions clés » restaient à régler et que tout accord nécessiterait l'approbation du droit chinois.
Plusieurs investisseurs de renom ont manifesté leur intérêt pour l'acquisition de la plateforme. Le géant technologique Oracle reste un candidat de choix, son cofondateur Larry Ellison étant connu pour être un proche allié de Trump. Parmi les autres acquéreurs potentiels figurent le milliardaire Frank McCourt, la star de « Shark Tank » Kevin O'Leary, le cofondateur de Reddit Alexis Ohanian, et même la star de YouTube MrBeast (Jimmy Donaldson), qui a confirmé faire partie d'un autre groupe d'investisseurs étudiant l'opération.
Une plateforme dans les limbes juridiques
Bien que TikTok ait été brièvement hors ligne pendant quelques heures juste avant l'investiture de Trump plus tôt cette année, elle a été rétablie peu après, incitant l'entreprise à féliciter le nouveau président pour avoir maintenu l'accès à l'application. Cette dernière extension continue de placer TikTok dans un vide juridique et politique, où les tensions géopolitiques et la politique intérieure influencent le sort de ce réseau social extrêmement populaire.
TikTok et ByteDance n'ont pas encore publié de déclaration officielle concernant la nouvelle extension.
Que ce passe t-il après?
Pour l'instant, TikTok dispose d'une marge de manœuvre de 90 jours pour trouver un repreneur américain et éviter une interdiction qui pèse depuis longtemps sur elle. Mais avec la prudence et l'affection de Trump pour l'application, et l'engouement de plusieurs groupes d'investisseurs de premier plan, les mois à venir pourraient remodeler l'avenir de l'une des plateformes numériques les plus influentes au monde.